Insuffisance des antibiotiques face aux bactéries multirésisantes

Les chercheurs réunis début septembre à Boston aux Etats Unis, à l’occasion de la 50ème conférence annuelle de l’ICAAC, l’Antimicrobial Agents Agency, ont évoqué la crainte d’une crise sanitaire majeure, provoquée par la résistance des microbes aux antibiotiques et le manque de nouvelles molécules.
#
En France, la lutte contre ce risque est illustré par le slogan : « Les antibiotiques ce n'est pas automatique », pour freiner vainement la surconsommation d’antibiotiques, dont nous serions l’un des champions au monde et qui est à l’origine de la résistance croissante des microbes et bactéries aux antibiotiques.
#
Seulement, on ne peut incriminer ni les patients qui les réclament, ni les médecins qui les prescrivent, comme dans le cas de l’angine, dont 9 millions de cas sont diagnostiqués en France chaque année.
#
Il existe deux types d’angines, l’angine virale et l’angine bactérienne, qui nécessitent, chacune des traitements différents, mais que rien ne permet de distinguer lorsqu’elle se déclare, d’où l’habitude du recours systématique aux antibiotiques.
#
A la surconsommation humaine s’ajoute l’usage excessif des antibiotiques utilisés à titre préventif chez les animaux d’élevages, ce qui fait que l’on trouve des traces d’antibiotiques un peu partout dans la nature.
#
De ce fait, le nombre de cas de bactéries multirésisantes, contres lesquelles il n’existe plus aucun antibiotique efficace ne cesse de croître, aussi bien dans les pays riches que dans les pays en développement.
#
Des études récentes viennent de signaler en Inde et au Pakistan de souches bactériennes ultra résistantes, qui pourraient coloniser la planète en peu de temps.
#
Les experts, et en particulier ceux du Centre des agents anti-infectieux de Vienne, ont déploré lors de la réunion à Boston, que l’industrie pharmaceutique ne répondait pas aux besoins de la médecine.
#
Ils craignent que l’humanité puisse retomber dans la situation sanitaire qui prévalait avant la découverte de la pénicilline, le premier antibiotique mis sur le marché, en 1929 en Grande Bretagne, par Alexander Fleming.
#
En dix ans, le nombre de nouveaux antibiotiques produits ou en développement a chuté de moitié, a reconnu un responsable du laboratoire Johnson and Johnson et il n’y aurait pas plus d’une cinquantaine d’antibiotiques à l’étude dans le monde, qu’il s’agisse des grands laboratoires ou de sociétés de biotechnologie.
#
Pour cette raison, les quelques molécules nouvelles, potentiellement capables de neutraliser les agents microbiens multirestants ne seront pas disponibles, selon lui, avant deux à quatre ans, au mieux.
#
La raison est la faible rentabilité des antibiotiques, comparée à celle d’autres médicaments car les agents multirésisantes ne représentent qu’un petit marché et les antibiotiques dits « de ville » suffisent, pour le moment, à venir à bout de la plupart des infections bactériennes banales.
#
La pression exercée par les pouvoirs publics, soucieux de l’équilibre des comptes de l’assurance maladie, pour réduire le prix des médicaments, joue sur le modèle économique du retour sur investissement des laboratoires pharmaceutiques, au détriment des molécules les moins rentables.
#
Pour sortir de cette impasse, qui est mondiale, une responsable du Centre des agents anti-infectieux de Vienne suggère la création de partenariats entre les secteurs publics et privés, à l’instar de ceux mis en place, avec succès, contre certaines maladies tropicales.
#
Autrement dit, il s’agirait d’obtenir des pouvoirs publics des fonds pour combler le déficit des investissements privés, aux premiers stades de la recherche et du développement de nouveaux antibiotiques.