Révision des seuils d’alerte pour les avions
Article lu 11872 fois, depuis sa publication le 07/06/2010 à 09:40:00 (longueur : 4425 caractères)
Alors que le nuage de cendres émis dans l’atmosphère par le volcan islandais entré en éruption au début du mois d’Avril a immédiatement paralysé le trafic aérien mondial, avec les conséquences et le coût que l’on connaît, on est en droit de se demander si les mesures prises étaient réellement justifiées.
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Il faut le croire, même si personne n’admettra aujourd’hui, avoir agi, sans prendre un recul suffisant, il est évident que la question mérite d’être posée car, depuis mi avril, un groupe de travail a été mis en place pour se mettre d’accord sur des seuils de tolérance des moteurs d’avions qui volent dans une atmosphère polluée par des cendre de volcan.
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L’objectif est d’instaurer une règlementation qui, tout en assurant la sécurité du trafic aérien, évite la répétition d’une telle situation, si elle n’est pas techniquement justifiée.
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Cette question revêt un certain degré d’urgence car le volcan islandais est toujours en éruption et un autre nuage de cendres peut surgir à tout moment, en fonction de la direction des vents dominants, au risque de venir troubler, une seconde fois le trafic aérien.
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Le groupe de travail rassemble, autour des autorités aériennes européennes et américaines les représentant des principaux avionneurs et motoristes, pour discuter des seuils de tolérance alors que les industriels n’avaient jamais communiqués sur ce sujet, tout simplement parce que ces données n’étaient pas exigées pour obtenir la certification des moteurs et des avions, auprès des autorités compétentes.
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Un accord a été immédiatement trouvé par l’établissement de trois seuils :
- 2 millionièmes de grammes de particules par mètre cube qui correspond aux conditions normales de circulation aérienne,
- entre ce seuil et 2 milligrammes par mètre cube, il est possible de voler, mais sous surveillance,
- au-delà de 2 milligrammes, les avions doivent rester cloués au sol.
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Le problème reste délicat car les cendres volcaniques sont composées de particules dures faites de quartz, de silice et d’alumine, qui peuvent endommager les réacteurs et en bloquer le fonctionnement en plein vol, sans certitude de redémarrage. Par ailleurs, un nuage de cendre n'est pas homogène, il peut être par endroit en dessous du seuil et à d'autres endroit au dessus, le tout changeant au gré des vents.
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Ce travail en groupe est intervenu alors que le Centre de surveillance des cendres volcaniques de Londres, un centre VAAC, est critiqué pour sa gestion de la crise et il est d'ors et déjà acquis que les règles qu’il a suivi et qui ont conduit au blocage du trafic aérien, devront être assouplies, mais dans des limites qui ne compromettent pas la sécurité des vols.
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Cependant, selon Météo France l’organisme qui pilote le centre VAAC français installé à Toulouse, le VAAC de Londres a fait ce qu’il fallait et que la décision de fermer le trafic aérien était inévitable, alors que le risque d’accident était élevé.
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La décision d’arrêter tout trafic aérien, en l’absence de toute directive, s’était appuyée sur les données fournies par les volcanologues islandais, sur les données météo et sur le modèle de circulation atmosphérique, par contre, il y avait des incertitudes majeures sur le volume des cendres rejetées et sur la taille des particules.
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A ce moment précis„ les informations recueillies au sol et par satellite ne permettaient pas de connaître avec certitude les concentrations de cendres dans l’atmosphère.
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Chaque éruption est un cas de figure particulier et les éruptions au sommet d’un glacier, comme en Islande, rejettent beaucoup de vapeur d’eau dans l’atmosphère, ce qui rend encore plus difficile le repérage des cendres.
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Le premier congrès scientifique sur les dangers des volcans pour l’aviation a eu lieu en 1991, sans faire avancer les connaissances scientifiques, alors que les compagnies aériennes ont toujours soutenu que face aux cendres volcaniques, il fallait appliquer la politique de zéro tolérance et gardes les avions au sol.
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Tous les pilotes ne partagent pas cet avis en estimant qu’une partie du ciel européen était resté praticable pendant la crise, mais encore faut il pouvoir la délimiter.
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Le point positif de cette affaire et sur laquelle on n’a pas fini de polémiquer est qu’il n’y ait eu ni incidents, ni morts, hormis les voyageurs restés en souffrance, mais ca, c’est une autre histoire, comme aurait conclu Rudyard Kipling.